Les accidents à la tête chez les marins professionnels

Selon une étude réalisée par l’IMP en 2022 pour le compte de l’Enim, les accidents du travail à la tête dans le secteur maritime professionnel sont certes peu fréquents (moins de 5% des accidents) mais ont, pour certains, une sévérité importante (les accidents graves à la tête sont beaucoup plus invalidants). Ce dossier a pour objectif de fournir des éléments chiffrés de l’accidentologie professionnelle maritime concernant les lésions traumatiques à la tête et de proposer des solutions de prévention.

SOMMAIRE

Chiffres clés des accidents ayant entraîné une lésion traumatique à la tête chez les marins professionnels

Les sources de données utilisées par l’IMP pour établir cet état des lieux quantitatif proviennent de l’Enim et couvrent la période 2016-2020. 

Caractéristiques des accidents à la tête

Sur la période étudiée, 339 accidents du travail maritime (ATM) ayant pour siège de lésion la tête ont été recensés. Plus de la moitié d’entre eux (57%) ont entraîné un arrêt de travail, ce qui a engendré 14 299 jours de travail perdus et le versement, par l’Enim, d’indemnités journalières (IJ) à hauteur de 502 157 €.

La durée moyenne des arrêts de travail pour ce type d’accident est de 74 jours et le coût moyen d’un ATM à la tête est de 2 602 €.

RÉPARTITION PAR SECTEUR D’ACTIVITÉ

Les 339 ATM ayant entraîné une lésion à la tête se répartissent de la façon suivante :

Les ATM se concentrent principalement sur le secteur des pêches où ils représentent plus de la moitié des événements enregistrés et plus de 60% des jours d'arrêt de travail des indemnités payées par l’Enim.

La durée moyenne des arrêts de travail à la pêche (81 jours par accident) est également nettement plus importante qu’au commerce (67 jours par accident) et qu’aux cultures marines (24 jours par accident). On note cependant que le coût moyen des arrêts de travail est quasi identique à la pêche et au commerce (2 700 €) alors qu’il est trois fois moindre pour les cultures marines (900 €).

La classification statistique des accidents proposée par l’Enim permet également de préciser la blessure. Pour les accidents à la tête sur cette même période : 

Circonstances des accidents à la tête par secteur

Une deuxième source de données utilisée dans le cadre de l’étude sur les lésions traumatiques à la tête, est le QCATM (questionnaire sur les circonstances des accidents du travail maritime). Il permet une analyse qualitative sur la période 2016-2020 (5 ans) pour les secteurs de la pêche, du commerce et des cultures marines.

Pêches maritimes

Commerce

Cultures marines

Analyse des ATM graves

D’après les données du service du contrôle médical de l'Enim sur la période 2016-2020, les ATM à la tête qualifiés de “graves” (c'est à dire ayant entraîné une incapacité partielle permanente - IPP) ne représentent que 3% environ de l'ensemble des ATM graves. Mais leur taux d’IPP (9%) est plus élevé que la moyenne. 

S’agissant des circonstances des ATM graves à la tête, on peut retenir que : 

Préconisations de prévention

Les différentes analyses montrent que les lésions traumatiques à la tête pour le secteur maritime  pourraient être très nettement diminuées en mettant l’accent sur des mesures de prévention primaire.

Globalement et quel que soit le secteur, il est dans un premier temps nécessaire pour l’employeur/armateur de clairement identifier tous les risques auxquels les marins sont exposés à bord du navire et ou à terre : chutes d’objets, chocs, heurts, etc. L’inventaire doit être exhaustif et concerner toutes les situations de travail. Le niveau de risque doit ensuite être évalué pour chaque situation de travail et les résultats de cette évaluation doivent être consignés dans le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP). Grâce à cette évaluation, un plan d’actions de prévention visant à réduire les risques d’accidents à la tête pourra être mis en place.

Le plan d’action doit déterminer s’il est possible de supprimer totalement les risques (ex : suppression des déplacements des marins dans une zone dangereuse de chutes d’objets de hauteur). Dans le cas contraire, des mesures de protection collective technique et organisationnelle, doivent être mises en place. Si le risque d’accident à la tête persiste, des casques et casquettes de protection sont mis à disposition des marins. Ces Équipements de Protection Individuelle (EPI) sont adaptés aux risques exposés, au poste de travail et au marin. Attention, les EPI ne doivent pas être la mesure de prévention prioritaire et/ou unique. 

Protections collectives

Sur les chalutiers de pêche au large il s'agit de limiter le balancement des engins de pêche (chalut, casier, drague notamment) lorsque les marins travaillent à proximité. Cela passe par des solutions techniques (ex : “banane” sur les chalutiers, câble de retenue pour limiter l’embarquement des dragues sur les coquilliers) et organisationnelles (choisir le moment opportun pour lever la charge). Par ailleurs, le treuilliste doit avoir une vue dégagée sur la manœuvre et la communication entre chaque marin doit être claire. L’installation de caméras et d’interphones peut y aider.

Sur les plus petites unités, lors des phases de virage, sur les caseyeurs notamment, des solutions techniques (virage automatique, commandes locales du vire-casier) existent.

Pour le secteur du commerce, les mesures de prévention doivent s’appliquer prioritairement lors des opérations de maintenance (qui comportent bien souvent des manutentions mécaniques à la grue et au palan) et lors des rondes et déplacements, activités les plus accidentogènes.

Quelque soit le secteur maritime, le principal risque d’accident à la tête lors des déplacements est de se cogner contre les structures du navire ou de l'installation terrestre. S’il n’est pas possible de supprimer les zones dangereuses, il convient de les signaler et de les protéger avec des renforts en mousse par exemple.

Dans les zones où des chutes d’objets de hauteur sont possibles (ponts extérieurs de porte-conteneurs, salle des machines de grands navires de commerce, etc.), il faut s’assurer du bon arrimage des charges et le cas échéant prévoir des plinthes et des filets de rétention pour protéger les marins en contrebas.

Exemple de renforts autocollants en mousse destinés à protéger des angles vifs. 

Protection individuelle

Si les mesures de protection collective ne permettent pas de supprimer totalement les risques d’accidents à la tête, un casque ou une casquette de protection doit être mis à disposition des marins. Il n’existe pas d’équipement unique, capable d’offrir une protection optimale pour tous les risques présents à bord d’un navire. Par ailleurs, la réglementation en vigueur n’impose aucun EPI (équipement de protection individuelle) précis mais demande qu’il soit adapté au risque encouru. Avant d’acheter un équipement il est donc nécessaire de bien connaître les différentes catégories d’EPI de la tête et de comprendre leurs spécificités techniques. L’étude des normes qui définissent les performances de protection de ces équipements met en évidence trois catégories : les casques de protection contre les chutes d’objets de hauteur, les casques de protection en cas de chute ou de choc avec une masse en mouvement et les casquettes anti-heurt.

DES CASQUES DE SPORT POUR UNE ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE ?

Il peut paraître surprenant de recommander des casques de protection pour les sports d’eaux vives, le ski alpin et même le skate-board… Mais bien que conçus pour le sport, ce sont bel et bien des EPI au sens de la réglementation ! L’utilisation de ces casques est donc parfaitement légale dans un cadre professionnel car il n’existe pas de distinction entre les EPI destinés au travail de ceux prévus pour le sport. Par ailleurs, la réglementation exige que les employeurs fournissent des EPI adaptés aux risques identifiés dans le travail. Dans ce cadre, les casques de protection pour le sport peuvent offrir des protections efficaces face à certains risques professionnels.

L'apposition du logo CE sur un casque (comme sur TOUS les EPI) atteste que celui-ci est fabriqué conformément aux règles définies par le réglement européen. Ce marquage est OBLIGATOIRE.

Les casques de protection contre les chutes d'objets de hauteur

Ces casques sont destinés à protéger le porteur contre les chutes d’objets et les blessures consécutives, grâce à l’absorption d’une partie de l’énergie d’impact accusée par la tête. La combinaison d’une calotte rigide et d’un harnais de maintien permet d’absorber les chocs pour limiter leur transmission au reste du corps, en particulier à la nuque.

Il s’agit d’une part, des casques de protection pour l’industrie (NF EN 397) prévus pour protéger principalement le dessus du crâne. La plupart des modèles sont équipés d’un réglage de tour de tête. Certains équipements sont optionnels : jugulaire, lunettes (ou écran) de protection, coques anti-bruit… D’autre part, on trouve les casques d’alpinisme (NF EN 12492) prévus pour offrir une protection plus enveloppante du crâne (front, arrière et côtés). Leur maintien sur la tête est supérieur grâce aux réglages de tour de tête et à la jugulaire installée de série.


Les casques de protection en cas de chute ou de choc

Ces casques sont destinés à réduire les risques de blessure au crâne grâce à l’absorption d’une partie de l’énergie d’impact consécutif à la chute du porteur. Ce sont les casques normalisés pour le ski alpin (NF EN 1077), les sports en eaux vives (NF EN 1385), les sports aériens (NF EN 966), le cyclisme, skate et roller (NF EN 1078).

Ils offrent une bonne couverture du crâne et un bon maintien grâce à la jugulaire et, le cas échéant, au réglage de tour de tête. Bien qu’ils protègent pour le même type de risque, leur capacité d’absorption peut varier d’un modèle à l’autre. Certains casques offrent une protection supplémentaire contre le risque de pénétration d’objets. Seuls les casques pour les sports d’eaux vives sont flottants.

Les casquettes anti-heurt

Les casques de protection contre les chutes d’objets de hauteur et les casques de protection en cas de chute assurent naturellement une bonne protection contre les petits chocs à la tête. Cependant, si l’évaluation des risques montrent que seul le risque de heurt avec des obstacles fixes existe à bord du navire, le port de la casquette de protection (NF EN 812) peut être suffisant. Appelée aussi casquette anti-lacération, elle est destinée à protéger le porteur lorsque sa tête vient heurter des objets durs et immobiles (arêtes vives par ex.), avec suffisamment de force pour provoquer des blessures superficielles. Elle n’est pas conçue pour protéger des projections ou chutes d’objets ou des charges en suspension ou en mouvement. Elle peut être munie d’une jugulaire qui réduit le risque de perdre la casquette suite à un coup de vent.

Tableau de synthèse

Le tableau ci-dessous identifie les niveaux de performance des casques et casquettes de protection selon le risque pour lequel on souhaite se protéger à bord d’un navire. Ils prennent en compte d’une part, les exigences fixées par les normes de référence de chaque équipement et d’autre part, de façon plus subjective, de réalités constatées à bord des navires. Ces évaluations ont un caractère informatif et ne peuvent en aucun cas se substituer aux informations fournies par les fabricants des casques et casquettes de protection auxquelles il faut systématiquement se référer.

Que faire en cas d’accident ?

Tous les traumatismes crâniens doivent faire l'objet à minima d'une surveillance simple pour un choc crânien "léger" sans symptôme et d'une téléconsultation médicale avec le CCMM de Toulouse pour les autres afin d'évaluer leur gravité et la conduite à tenir.

Attention car les symptômes peuvent se manifester immédiatement mais également quelques heures voire quelques jours suivant le coup à la tête.

Une surveillance attentive et régulière du marin victime de choc crânien est donc indispensable pour détecter l'apparition possible de symptômes comme :

Ressources associées

Affiche "À BORD, PAS DE PRISE DE TÊTE, JE PORTE MON CASQUE"

Cette affiche (format A2, PDF) est destinée à sensibiliser les marins professionnels, quelque soit le secteur maritime, au port des casques et casquettes de protection.

Si vous souhaitez recevoir une version papier de cette affiche, contactez l'IMP. 

Fiches de prévention

Trois fiches de prévention sont disponibles au téléchargement par secteur d'activité maritime. Au format A4 recto-verso, ces fiches synthétisent le travail de l'IMP concernant l'analyse statistique des accidents du travail maritime à la tête et les préconisations de prévention qui en découlent.

Secteur Pêche
Secteur Commerce maritime
Secteur Cultures marines