Prévenir le risque chimique à bord des navires - Obligations pour les armateurs
De nombreux produits chimiques sont manipulés ou employés sur les navires : des carburants, des huiles et des graisses, des produits de nettoyage ou de désinfection, des peintures...
Souvent, ces produits représentent un danger pour la santé et la sécurité des marins. Pour prévenir ces risques, le Code du travail impose aux armateurs de nombreuses obligations qui peuvent être applicables à tous les agents chimiques dangereux, ou seulement à certaines catégories particulièrement problématiques, notamment les CMR (agents chimiques cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques).
Quelles sont les obligations essentielles qui incombent aux armateurs en matière de prévention du risque chimique ?
SOMMAIRE
1. Évaluer les risques
Cette obligation spécifique d’évaluation du risque chimique vient renforcer l’obligation générale d’évaluation des risques professionnels prévue à l’article L.4121-3 du Code du travail. Elle doit s’appuyer sur un inventaire de tous les agents chimiques dangereux utilisés à bord.
Les résultats de l’évaluation du risque chimique doivent figurer dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER). Lorsqu’ils révèlent un risque pour la santé et la sécurité des travailleurs, l’armateur doit mettre en œuvre des mesures de prévention.
2. Supprimer les risques
L’élimination pure et simple d’un agent chimique dangereux est la mesure de prévention la plus efficace pour supprimer les risques d’atteinte à la santé. Sur les navires, elle est souvent difficile à mettre en œuvre, mais elle est parfois adoptée par des armateurs (ex. : pour le nettoyage du navire, remplacer les produits chimiques par un simple lavage au nettoyeur haute pression).
3. Remplacer les produits chimiques dangereux
Contrairement à l’élimination, le remplacement d’un produit chimique dangereux par un autre moins dangereux est une mesure de prévention qui est envisageable sur les navires.
Exemples :
pour le dégraissage de pièces mécaniques, remplacer le gazole marin suspecté d’être cancérogène par un dégraissant qui ne présente pas ce danger,
pour l’élimination des coulures de rouille, remplacer un acide classé corrosif ET toxique (acide fluorhydrique), par un autre acide « seulement » corrosif (acide phosphorique).
4. Mettre en œuvre des protections collectives
Destinées à réduire les risques qui subsistent, ces mesures de protection collective peuvent être techniques (ex. : installer une ventilation mécanique dans un espace clos qui va être repeint.) ou organisationnelles (ex. : avant la pulvérisation d’un acide dans un espace de travail, interdire l’accès de cet espace aux autres marins pour réduire le personnel exposé aux risques).
5. Fournir des EPI adaptés
Dans le domaine du risque chimique, les EPI les plus couramment recommandés concernent la protection des mains (gants), des yeux (lunettes ou écran facial), du corps (tenue imperméable ou combinaison jetable) et des voies respiratoires (masques à cartouche filtrante). Pour être efficaces, les EPI doivent être en bon état.
Par ex. à bord des navires de pêche, les gants portés depuis plusieurs jours pour le traitement des captures ne sont plus imperméables ; ils ne constituent plus de protections efficaces face aux produits chimiques.
La mise à disposition des EPI est à la charge de l’armateur qui doit les fournir gratuitement aux marins, accompagnés de consignes d’utilisation.
6. Garantir un stockage sûr
Les agents chimiques dangereux sont conservés dans leur emballage d’origine, convenablement étiqueté. Quand ils sont incompatibles, ils doivent être séparés pour supprimer le risque d’un mélange accidentel.
Par ex. dans le peak avant d’un navire, le bidon d’acide ne doit pas être conservé à côté du bidon d’eau de javel.
Les lieux de stockage doivent être munis de dispositifs de rétention pour empêcher les écoulements accidentels.
7. Donner accès aux F.D.S (Fiches de Données de Sécurité)
Cette obligation signifie que l’armateur doit collecter les FDS et les tenir à jour.
Les FDS sont des documents qui contiennent toutes les informations de sécurité relatives à un produit chimique. Leur format et leur contenu sont définis par la réglementation. Elles sont rédigées en français. Les fabricants ou les distributeurs d’agents chimiques dangereux doivent obligatoirement (et gratuitement) les remettre à leurs acheteurs.
En plus de veiller à ce qu’elles soient accessibles aux marins, l’armateur doit transmettre les FDS au médecin des gens de mer.
8. Former les marins
Après l’accès aux FDS, c’est la deuxième mesure de prévention qui entre dans le champ de la formation et de l’information des utilisateurs.
La formation des marins doit notamment traiter :
des agents chimiques dangereux présents sur leur lieu de travail,
des risques qu’ils comportent pour leur santé et leur sécurité,
des précautions à prendre pour leur protection, y compris les règles d’hygiène et les consignes d’utilisation des EPI.
9. Rédiger une notice de poste
C’est aussi une obligation de formation et d’information des utilisateurs de produits chimiques.
La réglementation n’impose pas de modèle pour ce document, mais il doit au moins contenir :
le nom du produit,
sa destination (ce à quoi il doit servir),
son dosage et son mode d’emploi,
les mesures de prévention et de protection à adopter.